C'est un billet de Violette qui m'a donné envie de relire cette bande-dessinée de Bilal, lue à sa sortie et qui m'avait laissé une impression étrange.... entre incompréhension et vague sentiment de déception.
Tout commence dans un monde étrange, de type post-apocalyptique. Un "coup de sang", dérèglement climatique brutal et généralisé, a totalement dévasté la planète, et seuls quelques endroits sont encore préservés du chaos généralisé. Le détroit 17 permet d'accéder à l'un ces lieux, l'histoire commence donc sur un bateau qui navigue en mer Méditerranée, où plutôt, ce qui en reste. Dans un monde où les bébés espadons se transforment en munitions, personne ne s'étonne de trouver des "domorobots", drones en forme de homard, qui vous apportent ce que vous leur demandez...
Franck Bacon, le chef de bord, avec son drone hippocampe (p. 7) |
Alors que la mer regorge d'embarcations occupées par de drôles de zouaves, du "nihiliste néo-nietzschéen de base" au mercenaire, en passant par les contrebandiers surarmés, sur terre, des épidémies déciment le peu de peuplement qui reste. Tandis que le récit avance, on apprend que les hommes ont pratiqué l'hybridation avec l'animal. Des humains possèdent l'étrange capacité de se régénérer grâce à une forme de renaissance grâce aux corps des dauphins, un des responsables des expériences médicales sur l'hybridation possède des nageoires, et d'autres disposent de capacités animales.
Je ne vous en raconte pas plus sur cette quête. Car c'est bien de cela qu'il s'agit, d'une quête, à la fois d'un lieu, le seul peut-être encore véritablement viable, mais aussi de celle d'une forme d'humanité, qui passe peut-être par la redécouverte de notre part d'animalité.
Une deuxième lecture a grandement facilité la compréhension de cette bande-dessinée. Le récit, riche et émaillé de très nombreuses références, déstabilise à la première lecture. Les dessins, d'une beauté plastique certaine, arrêtent le regard, si bien que la découverte permet difficilement de ce centrer sur un scénario parfois un peu obscur. La relecture permet de suivre plus facilement le déroulement de l'histoire, et de mieux cerner les différents personnages qui, dans ce monde entre le gris et les bleutés, finit par uniformiser les visages. Bilal nous propose ici une sorte de western apocalyptique, version fin du monde. Les personnages, grandes gabardines et chapeaux rivés sur la tête, portent l'air blasé du cow-boy revenu de tout. Mais le désert ici, c'est la mer où l'on pourrait presque entendre la musique du grand Sergio : wouin wouin wouin.... Allez, la nouvelle partition de Bilal mérite finalement le détour, et sans doute une troisième lecture !
Charles Bronson dans Il était une fois dans l'Ouest |